Les notaires constatent une augmentation du nombre de refus de prêt face à un taux d’usure considéré comme trop bas par les enseignes bancaires.

Lorsqu’elle a contacté sa conseillère à la Caisse d’Epargne Ile-de-France au cœur du mois d’août pour ouvrir un compte joint, Cécile a aussitôt été mise en garde. « Elle m’a dit : “J’espère que vous ne voulez pas souscrire un, nous n’en proposons plus jusqu’en octobre, à cause du taux d’usure.” » Contacté, l’établissement fait savoir qu’il est effectivement amené « à refuser des dossiers au cas par cas en raison du taux de l’usure », mais qu’« aucune consigne générale n’a été donnée ». Et cette frilosité est partagée par la plupart des enseignes bancaires.

Si bien que, dans leur dernière note de conjoncture, parue en juillet, les notaires de France ont évoqué « des taux d’usure qui freinent l’accès au crédit et font courir un risque de blocage du marché immobilier ».

Ménager les marges

La vocation de ces derniers est de protéger l’emprunteur contre des taux de crédit trop élevés. Ils correspondent au taux maximal légal que les banques sont autorisées à proposer à leurs clients : le coût du prêt, y compris l’assurance-emprunteur et les frais de dossier, doit rester au-dessous de ce plafond. C’est la Banque de France qui, chaque trimestre, le fixe, à partir des taux moyens pratiqués par les banques et augmentés d’un tiers.

Les taux d’emprunt ayant été, ces dernières années, historiquement bas, le taux d’usure l’est donc également (2,57 % pour les crédits de plus de vingt ans, et 2,60 % pour ceux d’une durée de dix à vingt ans, depuis le 1er juillet), alors même que les taux de crédit immobilier remontent, dans la foulée des taux des OAT (les titres d’emprunt de l’Etat), à dix ans. Pour les notaires, qui « constatent une augmentation du nombre de refus de prêt », cette hausse très lente des taux d’usure « exclut de fait certains ménages ».

Dans ce contexte, les banques rechignent, depuis quelques mois, à travailler avec des courtiers, afin de ménager leurs marges. « Elles estiment qu’il n’est pas rentable de prêter dans les conditions actuelles et attendent la prochaine hausse du taux de l’usure, au 1er octobre, explique Sandrine Allonier, la directrice des études du courtier en crédits immobiliers Vousfinancer. Seul un quart des banques avec lesquelles nous travaillons sont encore d’accord pour prêter, elles sont donc submergées de dossiers et ne sélectionnent que les meilleurs profils. » Chez ce courtier, le taux de refus est passé à 30 %-40 % des dossiers présentés, contre 10 % l’an dernier.

 

Source : Le Monde